Les banques centrales inondent les marchés de liquidités : QE3 de la Fed, QE4 de la Bank of England, QE9 de la Bank of Japan... La politique non conventionnelle de la BCE est plus subtile puisqu’elle prend la forme d’un engagement hors-bilan, le fameux ‘Draghi put’. En conséquence, les taux d’intérêt dits sans risque sont partout maintenus à des niveaux artificiellement bas.
Le processus de sortie de ces politiques ultra accommodantes sera très lent. L’économie américaine montre des signes de reprise, portée notamment par la convalescence de l’immobilier résidentiel et la baisse des coûts énergétiques, mais cette embellie reste fragile en raison, entre autres, d’une politique budgétaire plus restrictive. Nous attendons une croissance molle pour les prochaines années, avec une baisse très progressive du taux de chômage.
Nous n’anticipons donc pas de crach obligataire, mais ne voyons pas de valeur dans les emprunts d’Etat bien notés offrant des rendements inférieurs à 2%. Nous privilégions le crédit, dont les spreads rémunèrent bien le supplément de risque pris, même si les rendements absolus restent historiquement bas.
Dans la quête de rendement, les actions apparaissent particulièrement attractives. Certes la prime de risque est enflée par les taux bas, mais les actions offrent un rendement sur dividende souvent supérieur au taux auquel les émetteurs refinancent leur dette. De nombreuses firmes ont beaucoup de cash dans leur bilan, ce qui suscitera rachats d’actions et fusion/acquisitions. Enfin, nombre d’investisseurs institutionnels sont largement sous-pondérés pour des raisons réglementaires.
A fin mars, le portefeuille est cependant très défensif : l’exposition actions est d‘environ 25% contre plus de 37% en début d’année. La raison ? Le poids de l’Europe continentale a temporairement été réduit : notre prudence découle du manque de visibilité sur l’Italie et des conséquences du sauvetage de Chypre. En outre, les derniers chiffres macro de la zone Euro sont inquiétants. Nous privilégions les sociétés européennes dont les revenus sont mondiaux et dont les valorisations restent attractives, valeurs pharmaceutiques et pétrolières notamment.
Les actions émergentes sont surreprésentées avec 11% du portefeuille : ce pari n’a pas été payant sur le trimestre mais nous souhaitons rester contrariants, après deux années de forte sous-performance. Nous gardons une pondération élevée au Royaume-Uni, à la fois sur les grandes capitalisations (FTSE 100), qui sont des sociétés globalisées, mais aussi sur les valeurs moyennes (FTSE 250), dont les valorisations sont attractives. Quant aux actions américaines, nous avons pris quelques bénéfices compte tenu des performances impressionnantes des indices sur le premier trimestre.
Nous gérons activement l’exposition aux devises : le marché des changes nous semble progressivement plus guidé par les fondamentaux des monnaies. Nous sommes structurellement acheteurs de devises émergentes, non seulement via les actions déjà mentionnées, mais également en nous portant acquéreurs de dettes en devises locales, souveraines et privées. Nous utilisons le dollar américain dans la gestion active du risque global du portefeuille.
Enfin, nous gardons une petite position sur l’or. Certes, la sortie progressive du QE3 de la Fed, dans le scénario favorable de reprise américaine, va peser sur les cours du métal jaune. Mais cette position, à contrecourant du consensus, constitue une assurance multirisque assez bon marché : au cas où cette reprise des Etats-Unis ferait long feu, contre certains risques extrêmes en Europe, couvrant la reprise de l’inflation dans certains pays émergents, et plus généralement jouant le rôle de refuge dans un contexte où l’exacerbation de la guerre des devises entraînerait une rechute de la confiance des investisseurs.
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